Tous les journaux ne traitent pas les nouvelles sous le même angle. Comme nous l'avons souligné hier, Le Courrier du Canada a plutôt insisté sur le processus lié à l'enquête préliminaire.
Le Courrier de Saint-Hyacinthe, dans son édition du 14 décembre 1897, choisit plutôt de raconter l'événement à travers le témoignage de Pasquale Camparoni, un des Italiens blessés le jour du drame. Voici donc l'affaire telle que rapportée dans ce journal.
«Je suis allé, mercredi soir, à l'heure de la malle, chez M. Bissonnette, marchand, qui tient le bureau de poste. J'allais là pour demander si j'avais des lettres et acheter de la bière. J'étais en compagnie de Grieco qui a été tué et de George Ferrari, un autre de mes compatriotes qui a été blessé dans la bagarre, mais moins que moi.
Dans le magasin nous avons rencontré Gédéon Deguire et Joseph Lalonde. Ce dernier est venu nous demander vingt cinq cents à emprunter. Nous lui avons demandé ce qu'il voulait en faire et il a répondu que c'était pour prendre un coup. Nous ne lui avons pas prêté 25 cents mais lui avons dit d'attendre que nous avions acheté de la bière et que nous lui payerions la traite. Comme nous parlions ainsi, M. Bissonnette arriva avec six bouteilles de bière. J'en pris trois bouteilles et Grieco les autres. Nous sommes sortis tous ensemble, Deguire et Lalonde derrière nous.
À peine nous trouvions nous dehors que Lalonde saisit Grieco à la poitrine et lui donnant une vigoureuse poussée le fit tomber en bas de la galerie dans la neige. Les bouteilles tombèrent aussi, mais je ne crois pas qu'elles se cassèrent. En bas de la galerie commença alors une luttre générale. Plusieurs coups de poings furent échangés. Ferrari fut blessé au commencement de la bagarre. À un moment donné, Lalonde ramassa une bouteille par terre et en frappa violemment Grieco à la tête.
Grieco s'affaissa immédiatement et la lutte continua entre les autres. C'est pendant cette dernière partie de la bagarre que j'ai été frappé. J'ai reçu plusieurs coups de poings dans la figure et finalement deguire ou Lalonde, je ne sais pas lequel, car je ne les connais bien et je n'ai pu rien distinguer, me frappa d'un coup de bouteille et je tombai, sans connaissance. Je ne me rappelle rien de ce qui s'est passé après. »
L'article précise ensuite que Camparoni avait plusieurs blessures à la figure et sur la tête. À un moment, on l'avait même cru mortellement blessé. Celui-ci s'en est toutefois tiré et fut le témoin-clé de l'affaire.